La police abbasside était sans conteste un outil indispensable à la gouvernance du territoire iraqien et de ses populations urbaines comme rurales. Read More
Cette institution joua un rôle singulier, mais peu connu, dans la mise en place d'un ordre social, politique, fiscal et moral aussi bien dans les villes que les campagnes de l'Iraq abbasside (132-334/750-945). Cet ouvrage se propose de jeter la lumière sur cette institution à partir d’un corpus édité varié et de sources manuscrites inédites. En partant de « ceux qui font la police », cette enquête se penche sur le fonctionnement de l’institution et ses pratiques en accordant une attention particulière aux
interactions entre les différents acteurs de la police et les populations. Elle permet d’éclairer, à travers le prisme sécuritaire, les rapports entre l’État prémoderne et les peuples qu’il gouverne. L’ouvrage envisage l’action de la police comme un processus en recomposition permanente et retrace l’histoire d’un « mode de légitimation de la force ». Il étudie la manière
dont l’État abbasside s’empare de la coercition physique et légitime l’usage qu’il en fait, tout en composant avec des acteurs non étatiques qui revendiquent l’exercice de missions de police.
3 Remerciements
5 INTRODUCTION
25 Préambule : les sources
26 1. Des hommes aux pratiques
52 2. La šurṭa dans le manuscrit de la Risālat siyāsat al-mulūk
PREMIÈRE PARTIE
LES CHEFS DE LA POLICE
CHAPITRE I. LES DYNAMIQUES DE CONSTRUCTION INSTITUTIONNELLE DE LA ŠURṬA À MÉDINE ET DANS L'IRAQ OMEYYADE
84 I. Les « premiers » chefs de la police : entre reconstructions abbassides
et projections
84 1. La figure de ʿUmar
86 2. La šurṭa à Médine : une invention ?
89 3. La šurṭa, une affaire provinciale
92 II. La šurṬa et la construction de l’état
92 1. Les politiques de recrutement
92 1.1. Le tournant omeyyade
96 1.2. L’autorité délégante en Iraq
98 1.3. Un recrutement local et tribal
100 2. Les missions de la šurṭa et ses agents subalternes
100 2.1. La šurṭa et le ḥaras : une délimitation progressive des compétences
103 2.2. Les champs d’intervention de la šurṭa
105 2.3. Les forces de l’ordre : composition et recrutement
108 3. La šurṭa : un acteur du maintien de l’ordre parmi d’autres ?
108 3.1. La coexistence des forces de l’ordre
110 3.2. La šurṭa et les non-musulmans
112 III. L’insoluble question des origines
112 1. Une étymologie obscure
116 2. Penser la šurṭa au-delà de la question de l’emprunt et de l’héritage
118 Conclusion
CHAPITRE 2. LE COMMANDEMENT DE LA POLICE À BAGDAD ET À SAMARRA : ORIGINES ET RECRUTEMENT
122 I. Le vivier des héritiers de la dawla d’al-SaffāḤ à la quatrième fitna
123 1. Le choix des chefs de la police
123 1.1. D’al-Saffāḥ à la quatrième fitna : le calife décisionnaire
126 1.2. Le poids de l’expérience révolutionnaire
128 1.3. Arabité et appartenance tribale
135 1.4. Un recrutement familial
138 1.5. Équilibre des pouvoirs et rotation des familles
141 2. Les chefs de la police en temps de crise
141 2.1. La quatrième fitna : la mise à l’épreuve des loyautés
144 2.2. Les descendants des chefs de la police et les abnā’ ahl al-dawla
147 2.3. La concurrence des autorités délégantes
151 II. Le monopole des Ṭāhirides sur la police
151 1. Les Ṭāhirides (204-280/819-893) : un système dynastique ?
152 1.1. La nomination de Ṭāhir : entre faits d’armes et changement de stratégie politique
154 1.2. Chef de la police : une fonction héréditaire ?
158 2. Le déplacement de la capitale
158 2.1. Les réformes d’al-Muʿtaṣim et la police à Samarra
160 2.2. Les militaires turcs et le recrutement des chefs de la police à Samarra
163 3. L’affaiblissement des Ṭāhirides
163 3.1. La fin des Muṣʿabites
164 3.2. La dissociation de la šurṭa du gouvernorat du Ḫurāsān et de l’Iraq
168 III. Une police qui se militarise ? Les ġilmān et la šurṬa (ive/xe siècle)
168 1. Al-Muwaffaq et la militarisation du pouvoir
168 1.1. Un régent tout-puissant ?
169 1.2. ʿUbayd Allāh b. ʿAbd Allāh : le dernier Ṭāhiride
171 2. Les vétérans d’al-Muʿtaḍid
171 2.1. Le retour à Bagdad et la réaffirmation de l’autorité califale
172 2.2. La guerre contre les Zanǧ et l’émergence d’une nouvelle génération de chefs de la police
176 3. Concurrences et luttes de pouvoir
176 3.1. Instabilité politique et rotation des chefs de la police
178 3.2. La désignation du chef de la police : un enjeu de pouvoir
181 3.3. Un commandement en transition
184 Conclusion
CHAPITRE 3. LES CHEFS DE LA POLICE EN IRAQ ENTRE URBANITÉ ET RURALITÉ
188 I. Centralisation et localisme sous les premiers abbassides
188 1. L’affirmation progressive de l’autorité califale dans les villes iraqiennes
188 1.1. La politique vis-à-vis des gouverneurs
193 1.2. Un gouverneur affaibli
194 2. Localisme, tribalisme et héritage omeyyade
194 2.1. Un recrutement local
196 2.2. Des chefs de la police dans un « long deuxième/huitième siècle »
200 2.3. La persistance de l’identité tribale
203 2.4. Les aḥdāṯ et la question tribale
205 2.5. Des stratégies de recrutement entre préservation des forces locales et instrumentalisation par le pouvoir
207 II. Le Bas-Iraq et les zones rurales en transition
207 1. L’intermède de Marw et la poursuite de la politique des premiers Abbassides
209 2. L’après-fitna : une réorganisation de la police iraqienne ?
210 2.1. La maʿūna, les maʿāwin et la šurṭa dans les sources narratives
213 2.2. La maʿūna, une spécificité des métropoles et des petites localités iraqien-nes ?
215 2.3. La création d’une police rurale
217 3. Un pouvoir central incarné par les Ṭāhirides : vers la délégation de la nomination
217 3.1. L’irruption du Sawād dans les sources
218 3.2. Des villes iraqiennes entre forces locales et autorité des Ṭāhirides
220 3.3. Un vivier sogdien-ḫurasanien ?
223 III. La connexion avec Bagdad
224 1. Une autorité délégante disputée
226 2. Un recrutement entre Bagdad et l’Asie centrale
227 2.1. L’élargissement du vivier de recrutement des chefs de la police
229 2.2. Une politique vacillante ?
230 2.3. La multiplication des circonscriptions : morcellement ou tentative de centralisation ?
233 Conclusion
CHAPITRE 4. FAIRE CARRIÈRE DANS LA POLICE : ENTRE AUTORITÉ CALIFALE ET STRATÉGIES PERSONNELLES
236 I. Des carrières militaires
236 1. L’entrée en fonction
236 1.1. Les modes de désignation
240 1.2. Oralité et actes d’investiture
242 1.3. Le développement de la prise à ferme
243 2. La rémunération des chefs de la police
243 2.1. Le salaire
245 2.2. La rémunération par la terre
252 3. Le cumul des fonctions
252 3.1. Le cumul des fonctions : une affaire provinciale sous les premiers Abbassides
254 3.2. Du cumul de compétences au cumul des circonscriptions : l’exception ṭāhiride ?
256 3.3. Des tentatives de concentration des pouvoirs dans la police de Bagdad
257 4. Révocation et promotion
257 4.1. Les révocations
261 4.2. Les secondes carrières des chefs de la police
270 II. Des militaires à la cour
270 1. Concurrences et réseaux interpersonnels
270 1.1. La carrière d’al-Musayyab b. Zuhayr et la construction d’un capital familial
274 1.2. Le développement de réseaux interpersonnels : l’exemple des Barmékides
276 1.3. L’effondrement des réseaux
278 2. L’expression de la loyauté
279 2.1. Loyauté et concurrence
283 2.2. Vers des loyautés éphémères
285 3. La construction d’un idéal professionnel et moral
286 3.1. Al-Ḥaǧǧāǧ, parangon du chef de la police omeyyade
290 3.2. Le ṣāḥib al-šurṭa dans l’adab al-naṣīḥa
292 3.3. La formation du chef de la police
295 Conclusion
DEUXIÈME PARTIE
GOUVERNER LES TERRITOIRES ET LES POPULATIONS
CHAPITRE 5. LE QUADRILLAGE DU TERRITOIRE
302 I. Les mutations du paysage de l’ordre à Bagdad
302 1. Le quadrillage policier de Bagdad
302 1.1. Espace et personnel policier
303 1.2. Bagdad, une « construction textuelle »
304 2. De la ville ronde aux deux rives
304 2.1. La ville ronde
308 2.2. Une ville double ?
310 2.3. Des postes et des ponts
314 3. Une police de quartier (al-rabʿ)
316 3.1. Du rubʿ au rabʿ
319 3.2. Les arbāʿ de Bagdad
322 4. Un paysage mouvant
322 4.1. Les établissements de la police au-delà du pont
324 4.2. Les prisons
329 4.3. Des lieux de communication politique
331 II. Le quadrillage policier du territoire iraqien
332 1. Les villes iraqiennes
332 1.1. Samarra
334 1.2. Les métropoles iraqiennes
337 2. L’invention d’une police rurale (iiie/ixe siècle)
337 2.1. De la ville à la campagne : une nouvelle approche de l’espace
340 2.2. Un aménagement étatique du territoire
343 2.3. Le maillage du Sawād
346 2.4. En marge de l’État : le contrôle des périphéries
349 2.5. L’extension de la couverture spatiale étatique
354 Conclusion
CHAPITRE 6. GOUVERNER LES POPULATIONS
358 I. Fiscalité et police
358 1. Les aḥdāṯ et le ḫarāǧ sous les premiers Abbassides
358 1.1. Au commencement, le cumul des fonctions ?
361 1.2. Les mises en garde du cadi de Baṣra
363 2. Quadriller pour mieux prélever : le rôle fiscal des chefs des maʿāwin
363 2.1. Taxes discrétionnaires et forces de police
368 2.2. Ḥimāya étatique et ḥimāya privée
372 2.3. Le cumul des maʿāwin et de l’affermage (ḍamān)
374 3. Police et fiscalité urbaine
378 II. Le contrôle de la mobilité
378 1. Hora tarda, hora suspecta : le contrôle nocturne
381 2. L’épreuve de l’identification
382 3. Laissez-passer et documents de passage
384 4. Des limites du contrôle de la mobilité
386 III. Le personnel policier subalterne
387 1. La gestion du personnel
387 1.1. Des policiers ancrés localement ? Recrutement et espace
389 1.2. Le recrutement du personnel policier subalterne
391 1.3. Origines et effectifs
395 2. Le contrôle interne de la police
395 2.1. Surveiller les agents
398 2.2. Une image en cause
400 2.3. Une police placée sous l’autorité du droit ?
402 IV. Anticiper le désordre
402 1. Surveiller et renseigner
402 1.1. La « tyrannie du regard »
404 1.2. Le renseignement
405 2. L’ère de la suspicion
405 2.1. Vers la constitution de savoirs policiers ?
408 2.2. Temps et espaces criminogènes
411 3. La production de catégories et l’organisation du monde
416 4. Le chef de la police et le muḥtasib : un enchevêtrement des compétences ?
416 4.1. Un agent discret ou un effet de sources ?
419 4.2. Espaces et délimitations des juridictions : sphères publique et privée
422 4.3. De l’application des peines
424 Conclusion
CHAPITRE 7. LA POLICE À L’ÉPREUVE
427 I. Une police contestée : la concurrence du monopole de la violence et de la loi
427 1. Un vigilantisme médiéval ?
428 1.1. Mais que fait la police ? Les muṭṭawwiʿa de Bagdad et la šurṭa
433 1.2. La réponse d’al-Ma’mūn
440 1.3. La šurṭa et les ḥanbalites, entre concurrence et coproduction de normes
444 2. De la coopération avec les forces de police
444 2.1. Des patrouilles de volontaires
446 2.2. Informer, signaler, dénoncer
449 II. Une police en crise ?
450 1. La police et les marges
450 1.1. Des laissés-pour-compte dans les rangs des forces de l’ordre
451 1.2. Les ʿayyārūn et la police
453 1.3. Des antimodèles
456 2. Résister à la police
456 2.1. Porter plainte contre la police
457 2.2. Se révolter contre la police
459 2.3. De l’affrontement violent aux formes dissimulées de la contestation
463 3. Le policier et le voleur, des figures de Janus
463 3.1. La police dans le bas monde et l’au-delà
465 3.2. Intelligence et ruse du voleur : une représentation en contrepoint
467 3.3. Conflits d’interprétations et appropriations des représentations
468 Conclusion
TROISIÈME PARTIE
LA JUSTICE RÉPRESSIVE, ENTRE PRATIQUES POLICIÈRES ET NORMES JURIDIQUES
CHAPITRE 8. PROCÉDURES ET BUREAUCRATIE POLICIÈRES
474 I. La routine policière et le fait divers : les sources
474 1. Des récits à caractère exceptionnel ou exemplaire ?
476 2. Le phénomène criminel dans les sources
478 II. La procédure pénale menée par la šurṬa
478 1. La saisine de la police
478 1.1. Les acteurs de la saisine
480 1.2. Le déclenchement de la procédure
482 1.3. Un personnel administratif
485 2. L’instruction de l’affaire criminelle
487 2.1. L’enquête
492 2.2. La confrontation et l’interrogatoire
496 2.3. Rendre le jugement : le chef de la police et le droit
501 III. Des archives policières ?
501 1. Du « destin des archives » policières
503 2. Des documents variés
503 2.1. Pétition et enregistrement des peines
505 2.2. Les registres carcéraux
508 3. La conservation des documents
510 Conclusion
CHAPITRE 9. PUNIR
515 I. Au coeur du rituel pénal
515 1. À propos du rituel et de ses usages
515 1.1. Que faire du rituel ?
517 1.2. Rituels et sources
519 2. Autorité, exécution et légitimité : le cas de la mise à mort
525 3. Les peines infamantes
526 3.1. Le tašhīr
528 3.2. Humiliation et dégradation morale
530 4. Publicité et exemplarité
530 4.1. Investir l’espace
532 4.2. Géographie des châtiments
534 4.3. De l’exemplarité de la peine
536 II. Autour de la peine : usages du pouvoir et appropriations
536 1. De la dissuasion à la réintégration
536 1.1. L’exclusion du monde des vivants et de celui des morts
538 1.2. Du stigmate
539 1.3. Le repentir
541 1.4. La prison : entre pression et punition
543 2. Négocier la peine
543 2.1. L’intercession
547 2.2. Adapter le rituel
548 3. Des résistances
549 3.1. Les armes du faible
550 3.2. Le supplice de Bābak
552 3.3. Un moment de péril
556 III. Les peines dans les textes normatifs sur la police : définitions et limitations
557 1. Droit et sources sur la police : un rapport complexe
559 2. La catégorisation des peines
564 3. Rebelle ou brigand ?
564 3.1. « Bāġī » et « muḥārib » dans la littérature juridique
566 3.2. Brigandage et rébellion dans la littérature normative sur la šurṭa
572 4. Le canon du doute et l’encadrement du ḥadd
576 5. Statut social et châtiment
576 5.1. Statut social et égalitarisme
579 5.2. La maxime sur l’indulgence
582 Conclusion
585 CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXES
597 Annexe 1 : Chefs de la police de la capitale (Bagdad et Samarra)
611 Annexe 2 : Chefs de la police de Baṣra
615 Annexe 3 : Chefs de la police de Kūfa
619 Annexe 4 : Chefs de la police de Wāsiṭ
621 Annexe 5 : Chefs de la police des circonscriptions rurales
626 Annexe 6 : Organigramme du personnel de la šurṭa à Bagdad
627 Annexe 7 : Arbre généalogique d’al-Musayyab b. Zuhayr
628 Annexe 8 : Arbre généalogique de Malik b. al-Hayṯam
629 Annexe 9 : Arbre généalogique de Ḫazim b. Ḫuzayma
630 Annexe 10 : Arbre généalogique de Nahik
631 Annexe 11 : Arbre généalogique des Ṭahirides
633 BIBLIOGRAPHIE
693 INDEX
721 Table des illustrations
723 Table de translittération
725 Table des matières