Le temps est une notion éminemment complexe. C'est lorsqu’il s’inscrit dans la langue que le temps éveille la curiosité des linguistes. La langue concernée ici est la langue des signes utilisée par la communauté des Sourds de Belgique francophone... Lire la suite
Le temps est une notion éminemment complexe. L'encre qui a coulé sur le sujet a garni bien des pages. Que ce soient les philosophes, les physiciens, en passant par les poètes et les romanciers, tous les esprits curieux se sont intéressés à ce concept en tentant, à défaut de pouvoir le saisir, de l'appréhender pour le décrire et comprendre son lien à l’homme. C’est lorsqu’il s’inscrit dans la langue que le temps éveille la curiosité des linguistes.
La langue concernée ici est la langue des signes utilisée par la communauté des Sourds de Belgique francophone (LSFB). Cette étude prend pour objet la façon dont le temps est exprimé en LSFB et s’appuie sur des recherches de même type conduites sur d’autres langues des signes (LS). Il est majoritairement entendu que ces langues ne disposent pas de paradigme verbal pour le temps. Par contre, elles présentent un système flexionnel aspectuel extrêmement riche qui semble, dans bien des cas, suppléer la flexion temporelle. Des ressources spécifiques sont par ailleurs sollicitées pour exprimer les informations de temps: des lignes du temps, des items lexicaux de type adverbial, certains marqueurs spécifiques, le recours à des pointés, le rôle de la main passive et celui des composantes non manuelles que sont les mouvements du corps, de la tête et l’expression faciale. Ces multiples facteurs s’articulent sous différentes combinaisons et construisent un système de référenciation temporelle riche et complexe.
Ce sont ces multiples éléments qui ont été étudiés en LSFB dans un ample corpus composé de trois catégories de discours: narratif, conversationnel et descriptif. La principale particularité observée réside dans le fait que les marques de temps sont pour ainsi dire absentes des narrations, comme si celles-ci étaient ancrées hors du temps, suspendues dans le monde intemporel de l’imaginaire.
Ce travail représente la première étude discursive menée sur la LSFB et ouvre la voie à de nombreuses questions relatives au temps, à l’aspect ainsi qu’aux critères définitoires des catégories de discours.