En 132/750, les Abbassides s'emparèrent du pouvoir au terme d'un mouvement dénonçant l’injustice des Umayyades. Lire la suite
La réforme de l'appareil judiciaire, contribuant à affermir leur légitimité, fut une des réalisations majeures de la nouvelle dynastie. La centralisation de la justice, l'uniformisation juridique et l’étroite association des cadis au souverain firent de la
judicature un instrument politique essentiel aux yeux du califat. Les Abbassides ne pouvaient pourtant prévoir les conséquences de cette réforme qui devait, à terme, fragiliser les fondements de leur autorité. En diminuant la dépendance des cadis vis-à-vis des pouvoirs locaux, ils ouvrirent la voie à de nouvelles revendications. Il n’allait plus de soi, désormais, que les cadis tenaient leur autorité judiciaire du calife. Ce livre retrace l’évolution de la judicature et de sa place au sein de l’État abbasside, en restituant les dimensions spatiales, temporelles et sociales de l’administration judiciaire, ainsi que la dynamique des relations entre les cadis d’Iraq et le califat. Lorsque les Abbassides perdirent la réalité du pouvoir au profit des Būyides, en 334/945, la judicature était métamorphosée. D’un fonctionnaire au service de son délégant, le cadi était devenu un magistrat capable de défendre son autonomie judiciaire.
Préface à la seconde édition
Remerciements
Avertissement
INTRODUCTION
Préambule : Les sources pour l'histoire des cadis d'Iraq
I - Chroniques arabes
II - Dictionnaires biographiques
III - Littérature d'adab et poésie
IV - Sources juridiques
PREMIÈRE PARTIE : UN FONCTIONNAIRE DE L'ÉTAT ABBASSIDE
CHAPITRE I : LA DÉLÉGATION DU POUVOIR JUDICIAIRE
I - De La Mecque aux amṣār : aux origines du cadi
1. L'ancien système arbitral
1.1. La justice au sein des tribus : le ḥakam
1.2. Les débuts de la umma : la justice du prophète
2. L’apparition d’une justice étatique
2.1. Les califes de Médine et le règlement des conflits
2.2. Une justice étatique
2.3. Un nouveau titre pour une ancienne fonction ?
3. Cadis et pouvoir sous les Umayyades
3.1. La question des nominations
3.2. Deux points de vue sur la judicature à l’aube de la période abbasside
II - Les abbassides et l’autorité délégante
1. Des Umayyades aux Abbassides : la transition judiciaire
2. Vers la centralisation des nominations
2.1. Des gouverneurs de provinces à al-Manṣūr
2.2. L’affirmation du pouvoir califien
2.3. Fitna et guerre civile : flottements sous al-Ma’mūn
3. Un siècle d’autorité centrale
3.1. Le temps des califes
3.2. Vers de nouveaux intervenants
4. Des secrétaires aux militaires : vers une tentative d’appropriation
5. Le rôle du grand cadi
Conclusion
CHAPITRE II : LE CHOIX DES CADIS
I - Le choix d’une école : intérêts locaux et pouvoir central
1. L’Iraq et les écoles juridiques
1.1. Les « anciennes écoles de droit »
1.2. Unité et diversité de l’« ancienne école » iraqienne
1.3. Des Umayyades à al-Manṣūr : le rôle des ʿulamā’
2. La politique juridique des califes abbassides
2.1. Tendances juridiques des premiers Abbassides
2.2. Vers une politique juridique diversifiée
3. Les ʿulamā’ des amṣār et le choix des cadis
3.1. La consultation de la population locale
3.2. Composition et structure des délégations
3.3. Vers une influence plus diffuse des notables locaux
4. Le choix des maḏhab-s
4.1. Le temps des gouverneurs
4.2. D’al-Manṣūr à al-Rašīd : résistance des traditions juridiques locales
4.3. Une tentative d’unification « ḥanafite » ?
4.4. Une diversification sur le modèle bagdadien ?
II - Le choix de la personne : critères de sélection et stratégies politiques
1. Le poids de l’expérience
1.1. De l’adab au fiqh
1.2. Perspicacité et savoir social
2. Sélection sociale et tribale
2.1. Une sélection sociale
2.2. Le choix ethnique et tribal
3. L’islam comme étalon supérieur : vers les conditions juridiques « classiques »
3.1. Al-Ḫaṣṣāf
3.2. Ibn al-Qāṣṣ
3.3. Al-Ǧaṣṣās
Conclusion
CHAPITRE III : AUX FONDEMENTS DU FONCTIONNARIAT JUDICIAIRE : DÉSIGNATIONS, RÉVOCATIONS, SALAIRES
I - Procédures de désignations.
1. L’examen des candidats
2. De l’oral à l’écrit : l’acte de nomination
3. Vers la prise à ferme
II - Modes de révocations
1. Raisons des révocations
2. Les acteurs des révocations
2.1. L’émir, le calife et le vizir
2.2. Quand le cadi prend les devants
3. Statut juridique du cadi révoqué
III - Cadis et salaires : un fonctionnaire
Conclusion de la première partie
DEUXIÈME PARTIE : LE SYSTÈME JURIDICTIONNEL IRAQIEN
CHAPITRE IV : LES CIRCONSCRIPTIONS JUDICIAIRES ET LEUR ADMINISTRATION
I - Les districts et leur étendue
1. Une règle d’unicité ?
2. L’attachement à une circonscription géographique
2.1. Des cadis « personnels » ?
2.2. Les principaux districts iraqiens
2.3. Une influence centripète : l’étendue des districts
2.4. Cadis de campagnes et arbitrage
3. Le cumul des circonscriptions
3.1. Premiers cumuls
3.2. Des circonscriptions multiples
3.3. Une logique géographique
3.4. La centralisation administrative
II - Les attributions du cadi : le cumul des compétences
1. De l’administration judiciaire aux fonctions religieuses
2. Du qāḍī au qāḍī l-ʿaskar
III - Les carrières judiciaires : une hiérarchie des circonscriptions ?
1. Une hiérarchie capitale/province
2. Carrières provinciales et carrières bagdadiennes
2.1. Les cadis de province
2.2. Les cadis de la capitale
3. Y avait-il une vie avant la judicature ?
3.1. Les « métiers libres » des cadis
3.2. Vers la professionnalisation
Conclusion
CHAPITRE V : LA CONTINUITÉ JUDICIAIRE
I - La constitution d’un réseau épistolaire
1. La pratique de la correspondance entre cadis
1.1. Ancrage historique de la procédure
1.2. Ibn Abī Laylā et l’évolution des procédés d’identification
2. Statut juridique de la lettre d’un cadi
2.1. Quelles affaires ?
2.2. Règles de rédaction
2.3. Procédures de transmission de la lettre
2.4. Conclusion : le statut de l’écrit
II - Passation de pouvoir et continuité judiciaire
1. La passation de pouvoir
1.1. La remise des archives
1.2. Des enquêtes préliminaires
2. Poursuite d’une affaire interrompue
2.1. Le procès interrompu avant le jugement.
2.2. Application d’un jugement prononcé par le cadi précédent
2.3. Présomptions et transition judiciaire
Conclusion
CHAPITRE VI : DES CADIS DE COUR
I - Le grand cadi
1. Origines de l’institution
2. Un cadi de cour
2.1. Le cadi du calife.
2.2. Fonctions judiciaires
2.3. Un conseiller juridique
3. Heurs et malheurs du grand cadi
3.1. L’ascension politique du grand cadi
3.2. Vers un déclin de l’institution
II - Les cadis dans le milieu de la cour
1. L’attrait de la cour
1.1. S’intégrer à la cour
1.2. Patronage et clientélisme
1.3. La cour, lieu de tous les possibles
2. Le rang des cadis
2.1. Honneurs et cadeaux
2.2. Tenir son rang, un exercice difficile
2.3. Le piège de la cour
Conclusion de la deuxième partie
TROISIÈME PARTIE : LES CADIS FACE AU POUVOIR POLITIQUE
CHAPITRE VII : CADIS ET GOUVERNEURS : HISTOIRE D’UNE ÉMANCIPATION
I - Une entente cordiale apparente
II - Servitude et affranchissement du cadi
1. Rivalités autour de la prison
2. Vers un renversement des rapports de force
2.1. Quand l’émir fait obstacle à la justice
2.2. Premiers changements : la désobéissance au gouverneur
2.3. La justice du cadi contre les exactions de l’émir
III - Les armes du cadi
1. Menaces de démission
2. Le recours au calife
Conclusion
CHAPITRE VIII : UNE INSTRUMENTALISATION POLITIQUE PAR LE CALIFAT
I - Le cadi, un homme de pouvoir
II - Des cadis sous surveillance
1. Les services de renseignement : théorie et pratique
2. Une présence systématique à l’audience ?
3. Un organe de liaison avec le califat
III - Au service de la politique califale
1. Grand cadi et cadis de cour : la façade légale du califat
1.1. Un représentant de la morale islamique
1.2. La transmission de l’héritage califien
1.3. Des agents du calife
2. Une instrumentalisation politique
2.1. Le cadi, informateur du califat
2.2. Des procès politiques
2.3. Une procédure inquisitoriale
2.4. Fatwā-s et légitimation d’actes politiques
Conclusion
CHAPITRE IX : LA LUTTE POUR L’AUTORITÉ JUDICIAIRE
I - Les premiers Abbassides : la judicature sous pression
1. Les concessions hésitantes d’al-Manṣūr
1.1. Déclarations califales et justice islamique
1.2. La pratique équivoque d’al-Manṣūr
2. D’al-Mahdī à al-Ma’mūn : un droit de regard sur la pratique du cadi
2.1. Le calife, référent supérieur de la justice
2.2. Le cadi, « associé » du calife ?
2.3. La miḥna : le modèle de l’obéissance au calife
II - Une volonté d’indépendance
1. Le cadi, un représentant du califat ?
2. Entre Allāh et le troupeau : pour une approche des mentalités
2.1. Lieux communs et légendes populaires : le cadi responsable devant Allāh
2.2. Qādī amīr al-mu’minīn vs qādī l-muslimīn
3. Les ʿulamā’ et la théorie de l’indépendance judiciaire
3.1. ʿUbayd Allāh b. al-Hasan al-ʿAnbarī et la limitation des pouvoirs califiens
3.2. La responsabilité devant Allāh
3.3. Vers une théorie juridique du lien entre cadi et calife
Conclusion
III - Images de résistance à l’ingérence du pouvoir
1. Des modèles de désobéissance ?
2. Le premier siècle abbasside et le paradigme de la sanction
3. Vers la reconnaissance du droit de résistance
4. Théorie de l’indépendance et pratique politique
IV - Du refus de collaborer à la course à la judicature
1. Argumentaire des cadis
2. La valeur sociale du refus
2.1. Une attitude politico-religieuse
2.2. Un modèle social
2.3. Une stratégie du refus ?
3. La course à la judicature
Conclusion de la troisième partie
Épilogue
Annexes
Annexe A : Cadis de Kūfa
Annexe B : Cadis de Baṣra
Annexe C : Cadis de Wāsiṭ
Annexe D : Cadis de la capitale (al-Hāšimiyya, Bagdad, Sāmarrā’)
Annexe E : Cadis de juridictions diverses
Annexe F : Les cumuls de circonscriptions
Annexe G : Carrières des cadis d’Iraq
Annexe H : Textes arabes
BIBLIOGRAPHIE
INDEX
Indes des personnes et des groupes
Index des lieux
Index des notions et des institutions
Table des cartes
Erratum
Table des matières