En mai 2002, la Belgique est devenue l'un des premiers pays au monde à autoriser, moyennant le respect de strictes conditions, la pratique de l’euthanasie. Cette légalisation a résulté d’une opportunité politique : la mise en place d’un gouvernement de coalition inédite, dite arc-en-ciel, et le renvoi dans l’opposition des partis sociaux-chrétiens, qui bloquaient ce dossier éthique depuis de nombreuses années. Par ailleurs, le besoin d’un encadrement légal de l’euthanasie s’imposait aux yeux de beaucoup, à la fois en raison de pratiques clandestines et abusives, inacceptables à l’égard des patients, et de questions d’insécurité juridique pour les médecins. Dès lors, sitôt que la possibilité d’un débat parlementaire s’est ouverte, la nécessité de légiférer a rapidement fait consensus parmi tous les partis politiques.
Mené principalement au Sénat, le processus législatif a consisté en trois années de discussions vives (les divergences d’approche s’incarnant notamment dans le dépôt de plusieurs propositions de loi et de centaines d’amendements), intenses (la gravité de la question à traiter suscitant une vigilance minutieuse), riches (les échanges étant nourris par de multiples auditions parlementaires) et plurielles (la loi relative aux soins palliatifs et celle relative aux droits du patient étant parallèlement élaborées). Il a été ponctué de nombreuses crises et tentatives de dépassement de celles-ci, ainsi que, à l’extérieur du Parlement, par quelques affaires judiciaires et événements tragiques. De larges pans de la société civile ont tenu à s’impliquer dans les réflexions, en ce compris des médecins et des éthiciens.
Dans ce premier volume, M.-L. Delfosse rappelle le cadre éthique, médical, juridique et politique dans lequel le débat sur l’euthanasie s’est ouvert en Belgique au cours des années 1990. Ensuite, elle rend compte des étapes que le processus législatif a connues au Sénat entre juin 1999 et la mi-octobre 2000.